Moi? Un parent hélicoptère
Le terme « parent hélicoptère » désigne le parent qui survole constamment son enfant… comme un hélicoptère. Il est sans cesse en mode surveillance et surprotection. Il souhaite évidemment le meilleur pour celui-ci, mais les moyens pour y parvenir sont considérés comme intrusifs et axés sur la performance.
En effet, on parle donc ici de la performance de l’enfant, mais aussi de soi, en tant que parent : « Si mon enfant réussit, alors j’ai réussi mon enfant ! » Mais cette relation parent-enfant n’est pas nécessairement caractérisée par de la confiance réciproque. Après tout, en étant omniprésent et en surveillant les moindres faits et gestes de son enfant, le parent ne lui envoie-t-il pas le message qu’il ne lui fait pas confiance ?
Pourquoi certains parents sont hélicoptères ?
Je ne vous apprends rien en vous disant que nous vivons actuellement dans une société de performance où on doit être parfait en tout point. Bien souvent, pour le parent, l’enfant est le prolongement de soi. Si ce dernier réussi, cela prouve que le parent est adéquat. Si ce dernier échoue, cela renvoie l’image au parent que ce dernier a foiré.
Le parent veut donc mettre toutes les chances de son côté pour que JAMAIS son enfant n’échoue. Comme s’il ne pouvait pas tolérer que son enfant soit confronté à des difficultés, dans une optique de bienveillance envers lui… mais qui est plutôt nocive, tout compte fait.
Au niveau plus personnel, il se peut que certains parents aient eux-mêmes grandi avec des parents hélicoptères, ce qui fait en sorte qu’ils reproduisent le modèle parental reçu, alors que d’autres ont été négligés au plan affectif durant leur enfance et souhaitent offrir tout le contraire à leurs enfants. Certains adultes plus anxieux peuvent avoir une tendance au contrôle, que ce soit dans leur vie professionnelle, amicale, conjugale ou parentale. D’autres parents ont du mal à mettre des limites à leurs enfants, de peur de les frustrer ou de les troubler de quelque manière que ce soit ce qui les amène à tout faire pour eux. Enfin, d’autres parents perçoivent leur enfant comme le prolongement d’eux-mêmes et souhaitent leur faire réaliser de vieux rêves qu’eux-mêmes n’ont pas atteints ou encore, ils ont l’impression que si leur enfant échoue, ce sont eux-mêmes qui échoueront par le fait même et ils trouvent cette possibilité terrifiante.
Est-ce que vous vous reconnaissez dans plusieurs de ces énoncés ? Est-ce que vous dépensez beaucoup d’énergie à tenter de contrôler ce que fait, dit et pense votre enfant ? Vous sentez-vous parfois épuisé ? Aimeriez-vous apprendre à lâcher prise, à faire davantage confiance à votre enfant… et à vous-même ? Vous culpabilisez-vous souvent par rapport à vos habiletés parentales ? Vous jugez-vous durement ? Vous refusez-vous des moments rien qu’à vous en raison de votre sentiment de devoir toujours être à la disposition de votre enfant en cas de besoin ? Peut-être êtes-vous un parent hélicoptère...
Est-ce la fin du monde ? Non. Et le fait de reconnaître comment on est représente la première étape vers le changement… si c’est ce qu’on désire !
Les effets sur les enfants
Les enfants qui grandissent avec des parents hélicoptères ont tendance à être moins autonomes, puisqu’ils n’ont pas eu l’occasion de faire des essais et des erreurs. Ils ont souvent une plus faible estime personnelle, ayant reçu le message fréquent qu’ils ne sont pas capables de réussir quelque chose par eux-mêmes. Ce message est compris entre les lignes chaque fois que son parent fait quelque chose à sa place alors qu’il en aurait les capacités. Les enfants de parents hélicoptères sont plus à risque d’adopter des comportements dits d’enfants-rois puisqu’ils sont habitués à tout recevoir de l’adulte; ils croient que tout leur est dû. Comme ils n’ont pas eu l’occasion d’apprendre à gérer l’échec et la frustration qui va avec, ceci demeure un enjeu pour eux à l’âge adulte. Ils ont également plus tendance à être sédentaires, ayant entendu maintes et maintes fois : « Ne sors pas ! Ne fais pas ceci ni cela : c’est dangereux ! » À l’adolescence, ces jeunes ont plus tendance à repousser leurs limites dans la consommation d’alcool et dans les activités à haut risque, puisqu’ils n’ont jamais eu l’occasion de le faire sous la gouverne de leurs parents. Ils ne connaissent pas leurs limites non plus, ne les ayant jamais testées. Enfin, à l’âge adulte, il leur est plus difficile de développer une relation intime avec un(e) partenaire puisqu’ils tendent à conserver une relation fusionnelle avec leur parent hélicoptère. De plus, comme ils n’ont pas eu l’occasion d’être confrontés à diverses situations leur permettant de se connaître, ils ont une faible connaissance d’eux-mêmes, qui mène bien souvent à une faible estime personnelle.
Les parents hélicoptères, comme tout parent, veulent ce qu’il y a de mieux pour leurs enfants. Or, à force de trop vouloir, on perd souvent de vue les effets réels de nos façons de faire auprès de nos enfants. Pourquoi ne pas leur laisser davantage de liberté ? Pourquoi ne pas les laisser essayer de nouvelles activités ? Pourquoi ne pas être un bon soutien émotionnel lorsqu’ils échoueront plutôt que de vouloir à tout prix leur éviter les échecs? Car ces derniers sont inévitables : aussi bien leur donner des outils dès leur plus jeune âge pour y faire face afin qu’ils deviennent des adultes avec de l’expérience de vie et des stratégies pour gérer les (inévitables) coups durs.
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Suis-je un parent hélicoptère ?
Vous vous demandez si vous êtes un parent hélicoptère ? Répondez par « oui » ou « non » à ces énoncés :
• Je choisis les vêtements de mon enfant.
• Je refuse de le laisser essayer de nouvelles activités.
• Je choisis pour lui les activités qu’il fera.
• Je corrige tous ses travaux et devoirs que j’annote.
• Je refuse que mon enfant escalade le module de jeux au parc de peur qu’il se fasse mal.
• S’il vit un conflit avec un ami, je m’interpose en appelant directement l’ami et ses parents pour tenter de régler le différend.
• Je vante les talents de mes enfants à tout le monde que je croise sans me rendre compte quen ça ne les intéresse pas.
• J’habille moi-même mon enfant, tous les matins, même s’il est capable de le faire lui-même.
• Je nourris mon enfant à la cuillère même s’il a déjà acquis cette habileté motrice.
• Je dors encore avec mon enfant de 12 ans parce qu’il a peur du noir.
• Je refuse que mon enfant se garde pour une durée de 15 minutes même s’il en a les capacités.
• Je veux savoir à tout moment ce que fait mon enfant.
• J’ai de fréquents conflits avec les enseignants de mon enfant que je trouve incompétents.
• Je lis fréquemment le journal intime de mon enfant… en cachette.
STÉPHANIE DESLAURIERS
Psychoéducatrice
www.ensemblemaintenant.com • Facebook : stephaniedeslaurierspsychoéducatrice
Le bonheur d’être un parent imparfait, Guy Saint-Jean Éditeur, 2017